Kessia – Chapitre 16 – Le weekend
Chaque soir, l’espace public de l’île où habite Kessia, grouille de monde.
Avant, les habitants rentraient se coucher dès que la nuit conquérait leur île. Partout, c’était l’obscurité. Donc on avait vite fait d’avoir peur. Mais maintenant, elle a changé d’aspect. Un air presque moderne règne un peu partout. La grand-route est longée de lampadaires même s’ils ne suffisent pas à chasser l’obscurité de tous les recoins. Et que, malgré tout, certains habitants continuent à se servir de leurs bougies, torches ou lampes à pétroles.
On n’a plus besoin d’avoir peur, de craindre l’obscurité. Désormais, on peut même veiller jusqu’au matin, marcher sans torche, sans avoir peur d’un serpent. Non, tout a changé. Plus de crainte, la nuit…
Le weekend, c’est le moment le plus animé de cette île. Son agglomération est située au Nord-Est. Et la grande place se trouve au milieu des habitations. Elle bouillonne de gens autant que de choses. Les cabarets, le cinéma, quelques salles de jeux etc. Les femmes y vendent des objets variés autant que de vivres.
Le weekend, c’est aussi le moment préféré des enfants pour se livrer aux loisirs. Beaucoup d’entre eux passent toute la soirée au ciné, dans les salles de jeux etc… D’autres se rassemblent sous la lumière crue du lampadaire implanté au milieu de la place publique. Parfois, ils jouent aux différents jeux comme cache-cache, gendarme-ou-voleur, ou d’autres encore. Quelquefois c’est le tour des jeux simples n’impliquant pas de courir, se cacher, se fouetter… Il y en a beaucoup qu’ils adorent tellement.
C’est aussi le moment où beaucoup de gens viennent découvrir ou passer un excellent moment dans cette île. Ce jour, l’arrivée de deux étrangers n’étonne personne. Ils ne demandent aucune aide, se contentant de suivre les autres passagers qui empruntent la grand-route. Une fois à la place publique, ils repèrent un cabaret où ils prennent refuge, après avoir parcouru la mer sous un soleil couchant, mais ardent.
– Que voulez-vous boire, messieurs ? demande le barman.
– De la bière pour moi, dit l’un, le plus âgé.
– Du jus pour moi, commande l’autre, le plus jeune.
Servi, le plus âgé décapsule sa bière et la sirote. Il soupire, soulagé. Son jeune compagnon l’imite. Tous les deux restent le regard fixé sur les gens affairés. Les femmes qui viennent installer leurs objets sur la place publique. Le bruit de la salle du cinéma, des jeux vidéo, règne, signifiant le début de l’ambiance. Mais un groupe d’enfants qui se dirige vers la salle de jeux vidéo, suscite leur intérêt. Ils se regardent dans les yeux, comme alertés.
Le plus jeune se lève. Son compère lui lance un regard interrogateur.
– Je reviens, explique le plus jeune.
– La patience est pénible, mais elle ne tue jamais, Pek, lui dit son acolyte dans un sourire un peu amer. Ce n’est pas la peine. Assieds-toi et mets-toi à l’aise.
Le nommé Pek paraît surpris. Mais il n’insiste pas. Il se rassied, regarde son compagnon les yeux fixés sur la salle de jeux vidéo.
– Tu es certain que ce n’est pas la peine, Lop ? s’enquiert Pek.
Lop le regarde un instant, puis regarde le barman. Pek comprend qu’il doit oublier ce sujet. Il n’en parle plus.
– Excusez-moi, monsieur, dit Lop au barman, après avoir vidé sa bouteille. Savez-vous où se trouve l’hôtel, ici ?
– Vous allez suivre ce chemin, commence le barman en leur indiquant la grand-route. L’hôtel est à quelques mètres d’ici. Il se trouve juste près de la boîte de nuit que vous n’aurez aucune peine à remarquer.
– Je vous en remercie, fait Lop.
– Je vous en prie, monsieur.
Les bâtiments dudit hôtel sont du style traditionnel. Ils sont construits en forme de cases, de cabanes tellement jolies. L’intérieur bien meublé est magnifique. Lop et son jeune compagnon s’offrent une chambre.
– Pek, tu dois être patient, lance Lop quand ils s’installent. Comment peux-tu commencer à interroger les enfants, le premier jour de notre arrivée ? Tu veux nous attirer l’attention des gens ?
– Pas du tout, répond Pek. Mais j’estime qu’il faut demander, si nous voulons connaître le coupable.
– C’est vrai, mais c’était très tôt. On retrouvera le coupable, parole de Lop.
Pek acquiesce.
Durant leur séjour, Lop et Pek mènent une petite enquête. Ils passent la plupart de leur temps dans le cabaret, à questionner prudemment quelques enfants. Ils font mine de s’intéresser à l’histoire de cette île. Parfois, c’est sur des personnes.
Déçus, les gestes exaspérants traduisent leur malaise. Le barman le devine, veut leur être encore utile, mais sa raison d’être dans sa buvette triomphe. Amasser de l’argent de ses clients, en se moquant bien de leur souci.
Lop commande une autre bière, encourage Pek à prendre la même chose. Pek décline, préférant du jus. Lop sourit. Soudain un groupe d’enfants bruyants retient leur attention. Les deux étrangers les regardent se diriger vers la salle de jeux vidéo.
Quelques instants après, Pek se lève pour quitter son compagnon.
– Je vais faire un match, déclare-t-il. J’aime beaucoup les jeux vidéo.
Lop secoue la tête, hausse les épaules et boit une gorgée de sa bière. Quand Pek sort du cabaret, Lop engage une conversation avec le barman.
– Votre île est magnifique ! commence-t-il. J’aime bien ce genre d’endroit.
– Merci monsieur, dit le barman. Mais la vie d’ici n’est pas si facile.
– J’ai bien pu remarquer ça. Que seraient les insulaires sans la pêche ? Moi je trouve qu’il faudrait transformer cette île en un grand site touristique. Un véritable petit jardin paradisiaque.
– C’est une bonne idée devant être atteinte de bonne volonté, affirme le barman.
Lop saisit sa bière, tire une gorgée avant de la reposer.
– J’aimerais réaliser des projets pour cette île, attirer les touristes, dit-il d’un ton rêveur en secouant la tête. Vous verriez votre île pleine de touristes. Je suis un ingénieur, j’ai des plans magnifiques et géniaux…, ajoute Lop.
A cet instant, Pek rejoint son compagnon, l’air radieux. Lop le regarde un instant et devine quelque chose.
– Ne viens pas me mentir que tu as gagné le match, dit-il.
– J’aurais aimé te mettre au défi, réplique Pek. Mais je suis fatigué. Il faut qu’on rentre. Nous venons d’obtenir un boulot.
– Boulot d’ingénierie, je suppose. Outre, je n’en veux pas, fait Lop, souriant avant de s’adresser au barman. Bon, monsieur, on en parle demain.
Les deux étrangers quittent la buvette plus que satisfaits. Ils s’arrêtent au milieu de la grand-route, inspecte une maison. Finalement, ils poursuivent leur chemin. Ils analysent les informations obtenues avant de passer à la redoutable étape.